La dysphasie

Concernant 2% des enfants en France, la dysphasie survient tôt dans l’enfance et perdure à l’âge adulte. Comment la repérer, la diagnostiquer et la prendre en charge ?

C'est quoi la dysphasie ?

C’est un dysfonctionnement cognitif qui touche le langage (compréhension et/ou expression). Elle fait partie de la famille des troubles des apprentissages (cf article). Il n’est d’ailleurs pas rare que sa présence soit associée à un autre trouble (dyslexie, dysorthographie, dyspraxie…).

La personne qui en souffre rencontre des difficultés au niveau de la compréhension et/ou l’expression d’un message verbal, qu’il soit oral ou écrit. Les 5 dimensions du langage peuvent être touchés : la phonologie, la morphologie, la syntaxe, la sémantique et la pragmatique.

Par ailleurs, plusieurs études ont mis en évidence que la dysphasie touche davantage les garçons que les filles.

Les types de dysphasie

Les dysphasies sont divisées en deux catégories : la première, dite « expressive », va affecter le développement du langage au niveau de l’expression et la seconde, « réceptive », va perturber la compréhension.

      • dysphasie de type phonologie-syntaxique
      • dysphasie de type production phonologique
      • dysphasie réceptive
      • dysphasie lexicale-syntaxique
      • dysphasie sémantique-pragmatique

Causes

La présence de facteurs génétiques et d’anomalies cérébrales a été mise en avant par les chercheurs. Le cerveau d’une personne dysphasique se développe différemment au niveau des aires cérébrales dédiées au langage, ce qui entraîne un dysfonctionnement neurologique.

Le trouble dysphasique n’est pas du à un retard mental, un déficit sensoriel ou un trouble psychiatrique. Cependant, il est généralement héréditaire.

Symptômes

Si les symptômes varient en fonction du type de dysphasie, un retard dans le développement du langage est systématiquement observé.

  • inadéquation de l’utilisation et l’organisation des sons d’un mot
  • manque du mot (difficulté à trouver le mot exact)
  • lenteur pour formuler ses idées ou trouver ses mots
  • utilisation fréquente de mots de remplissage (« chose, machin, truc… »).
  • construction de phrases atypique (« boit il » au lieu de « il boit »)
  • hésitations/pauses dans le discours
  • difficulté à définir verbalement un concept, une idée
  • utilisation erronée des mots de liaison, voire oubli
  • compréhension globale restreinte
  • incompréhension des mots-questions (où, quand, comment, pourquoi…), des notions temporelles (avant, après, plus tard, tantôt…) et/ou spatiales (en haut, en bas, à gauche, par-dessus…).
  • difficulté à comprendre et à acquérir les mots abstraits
  • difficulté à comprendre les énoncés longs et complexes
  • accès limité aux expressions figurées et au 2nd degré
  • difficulté à saisir l’inférence (« le sol est mouillé → il a plu »)

Diagnostic: par qui et quand ?

Généralement, le diagnostic est établi à partir de 5 ans. Cependant, il n’est pas utile d’attendre ce délai pour consulter si votre enfant montre des signes précurseurs avant 3 ans.

Spécialiste dans le développement langagier, l’orthophoniste aura un rôle prépondérant pour confirmer le diagnostic. Le bilan orthophonique évaluera les compétences orales et écrites et confirmera la nécessité d’une rééducation.

Par ailleurs, consulter d’autres professionnels spécialisés permet d’écarter d’autres pathologies potentielles. Evaluer l’audition (bilan ORL) et le fonctionnement intellectuel (psychologue/neuropsychologue) confirmera que les symptômes sont bien causés par une dysphasie, et non par une surdité ou par un retard global de développement.

Le diagnostic est une étape essentielle. Il permet d’envisager les meilleures adaptations à mettre en place pour alléger le quotidien. L’enfant dysphasique, parfois moqué pour ses difficultés à communiquer en comprend leur origine et se voit confirmé qu’il est aussi intelligent que ses pairs. Le diagnostic n’est donc pas une fin en soi: c’est le début d’un nouveau parcours.

Prise en charge

La rééducation orthophonique est le seul traitement officiellement reconnu et remboursé par la Sécurité Sociale. Il s’agit d’un travail spécialisé de longue durée, qui demande une implication de la part du patient et de tous les partenaires autour de lui (famille, école, professionnels de santé).

Sur le plan scolaire, il est possible de demander à l’école la mise en place d’un P.A.P., série d’aménagements pédagogiques pour soulager l’élève dysphasique. Par ailleurs, le dispositif ULIS – Trouble Spécifique du Langage permet également à ces élèves de suivre un cursus en classe ordinaire, tout en bénéficiant quelques heures par semaine d’un enseignement adapté à leurs difficultés. Il faut toutefois obtenir une notification MDPH pour pouvoir intégrer une ULIS.

La souffrance psychique liée à la dysphasie doit être écoutée et accompagnée. Le dysphasique peut ressentir une intense frustration pour se faire comprendre et exprimer ses émotions. Il peut parfois être victime de moqueries et de rejet, perçu par les autres comme opposant, perturbateur ou immature. Certains signes doivent attirer l’attention des parents : échec, décrochage ou phobie scolaire, isolement, anxiété, dépression, agressivité, difficultés relationnelles…

Un suivi psychologique (individuel ou en groupe de parole) peut être profitable pour développer la confiance en soi, la gestion des émotions et le rapport aux autres.